Ce en quoi nous croyons
C’est, enfin, au nom de cette approche élargie de la Justice transitionnelle que nous voulons désormais aller plus loin. Si ce site regorge de projets à construire et de perspectives nouvelles, cette diversité repose sur une conviction en des valeurs. Tous nos projets ne seront que s’ils s’incarnent dans nos valeurs fondatrices, dont le respect doit – aujourd’hui et demain – guider notre action et donner sens à notre futur.
Nous sommes originellement des universitaires, des gens de savoir et de réflexion, mais nous avons décidé, comme d’autres avant nous, de faire de ces connaissances les leviers des valeurs que défendait Louis Joinet.
- Des connaissances sont d’abord des exigences.
La mission de l’IFJD est de soutenir le savoir et la réflexion, dans toutes leurs dimensions et dans toute leur exigence. Associé aux structures universitaires les plus reconnues et encourageant, par l’intermédiaire de ses concours, les meilleurs travaux réalisés en France et à l’étranger, l’IFJD développe des actions de production et transmission de la connaissance et de soutien à la recherche scientifique et universitaire. Convaincus des vertus essentielles du débat et même de la confrontation des idées, nous voulons réfléchir beaucoup et avec d’autres venus de toutes disciplines et de tous les horizons pour tenter de penser ce que le droit et la Justice peuvent apporter à nos sociétés. La construction de la Démocratie, l’émergence d’une Justice pour tous et la lutte contre l’impunité sont à ce point complexes que le discours juridique ne peut à lui seul prétendre les expliquer et – encore moins – les comprendre. Il nous faut alors, sans renier notre méthode, nous tourner vers d’autres sciences et vers d’autres penseurs, historiens, politistes psychologues et tant d’autres. Le nouveau droit de la démocratisation est un défi qui nous engage à l’excellence et au partage intellectuel pour tenter d’en bien saisir le sens.
- Des connaissances qui sont aussi des engagements.
L’héritage de Louis Joinet nous oblige et nous inspire. Cet héritage s’incarne dans la volonté d’agir concrètement pour la reconstruction de la Démocratie, pour la défense du pluralisme et des droits humains, pour la réduction de la violence et pour faire de la mémoire et de ses traumatismes des instruments d’apaisement et de réconciliation. Si la connaissance nous impose rigueur et distance épistémologique, l’IFJD ne fera pas le choix de la neutralité et de l’indifférence. Louis Joinet a construit, pensé et inspiré tous les grands mouvements de cette fin de siècle qui vit les dictatures tomber, les tortion-naires condamnés. Ses leçons figurent parmi les plus belles idées de ce moment décisif de l’histoire du monde, celles qui portèrent Mandela au pouvoir et finirent par avoir raison de Pinochet et de ses complices. Pour lui, le légal ne devait être qu’un instrument au service du Juste et le droit était d’abord un outil de Justice. C’est à ce choix et à cet engagement que nous voulons être fidèles. C’est ce choix qui nous a conduits, aux côtés du docteur Mukwege, à soutenir et à renforcer le centre de prise en charge holistique des victimes de violences sexuelles à Bangui ou à enquêter – avec nos partenaires d’Avocats sans Frontières – dans les prisons de RCA sur les violences qui s’y commettent. Constater les violences mais aussi identifier les responsables, documenter les faits, mais aussi les dénoncer. Le droit n’est pas, pour nous, que dans les livres et les professeurs ne sont pas condamnés à raconter une histoire qu’ils n’ont jamais vécue. Nous voulons donc essayer, modestement mais de toutes nos forces, d’être de ces universitaires qui vont sur le terrain et s’engagent en faveur des principes qu’ils enseignent.
- Des connaissances, enfin qui se veulent solidaires.
Fidèle aux enseignements d’Alexandre Varenne d’abord et de Louis Joinet, engagés l’un et l’autre en faveur de l’éducation populaire, l’IFJD s’ouvre à tous les publics et à tous les terrains. Nous souhaitons aller loin et partout. Partout où le droit est nécessaire et où des universitaires peuvent apporter. Nous som-mes des universitaires, nous donnons des cours et nous écrivons des livres. Que nos cours aillent au-devant de tous des étudiants en créant des écoles dans des lieux improbables où la Justice doit d’abord toucher les esprits, pour pouvoir – un jour – exister devant les tribunaux. Notre place est, aussi, aux côtés des ONGs et des acteurs de la société civile pour leur apporter notre con-cours. La formation de bons professionnels pour aujourd’hui ou pour demain est l’une des conditions de la réalisation de l’idéal de Louis Joinet. Il soutenait le théâtre de rue, pensons désormais l’Université de la rue pour que se forment les acteurs de son émancipation. Notre place est aussi avec tous ceux pour qui la Justice n’est rien d’autre qu’une fausse promesse ou un espoir déçu.
Que nos livres parlent de tous ceux dont on ne parle jamais, de tous ceux devant lesquels le droit détourne le regard pour regarder ailleurs.
« Parlez de nous » nous ont un jour demandé des représentants d’un peuple disparu, d’un peuple de la nuit, qui avait tant lutté et qui avait tant subi. C’est bien d’abord pour ces victimes là que prend tout son sens la Justice transitionnelle qui « au-delà de la punition, cherche à réparer et à reconstruire et qui au-delà de la sanction se veut instrument de réconciliation».